Certains itinéraires tiennent au hasard des rencontres. Antoine Chance est bien placé pour le savoir. Depuis 2010, l’artiste bruxellois conjugue la chanson française à sa façon, mais nourrit volontiers sa musique d’autres sensibilités. C’est qu’un avis peut être précieux. À commencer par celui de Marc Moulin. Un jour, l’homme aux multiples talents souffle le mot Chance dans l’oreille d’Antoine et tout s’éclaire : une carrière solo voit le jour.
Au printemps 2012, Chance publie un premier disque produit par Renaud Létang (Feist, Gonzales, Katerine). Entre un piano et une guitare, les mélodies exposent les bribes d’une personnalité à part. Aujourd’hui, l’artiste se dévoile un peu plus encore à travers neuf titres décontractés et affranchis, totalement libérés des modes. Rassemblés sous une pochette chatoyante, ces nouveaux morceaux tiennent d’abord à un lieu : le studio OTØMN. Caché dans les ruelles de la capitale européenne, l’endroit a connu plusieurs vies. D’abord voué à l’imprimerie, puis au cinéma, l’espace est à présent squatté par un collectif de graphistes et plasticiens. C’est là qu’Antoine Chance compose, là aussi qu’il se lie d’amitié avec Adrien Derez aka Solleck, un garçon plutôt porté sur l’animation visuelle. Les deux esprits se rencontrent et donnent corps à un univers hybride. Entre reflets et images projetées, couplets et refrains suspendus, une fresque synthétique se profile. Enrichie par des textes signés Veence Hanao, Carl Roosens (Carl et Les Hommes Boites, Facteur Cheval) ou Marcel Kanche (Bashung, -M-), l’œuvre délimite les contours d’un deuxième album.
Toujours aussi minutieux, Chance ne calcule plus. Désormais, le chanteur écoute son cœur et laisse libre cours à ses envies. C’est une question de passion, une évidence aussi : perfection et émotions ne font pas nécessairement une grande chanson. L’inconnue est donc là, partout. Omniprésente, elle arpente les morceaux de ce nouvel album. Né dans l’urgence de l’instant, ce disque résulte d’une prise de risque optimale et d’intuitions fatales. Ici, les petits accidents de parcours ont été conservés. Envers et contre tout. Des premières prises de voix à quelques notes pianotées au détour d’une idée soudaine, des détails sont restés. Inchangés, imparfaits, mais tellement vrais.
En phase avec ses aspirations, Chance apporte un vent de fraîcheur à la chanson d’ici et d’ailleurs. En français dans le texte, ses mots s’évadent ainsi au-delà des clichés et classifications d’usage. Légers, en expansion dans l’espace, les nouveau morceaux cherchent la lumière (‘L’astre éclaire’), le grand air (‘Les nuages’), l’absolu (‘Si vivante’). Ailleurs, le chanteur mise sur une économie de moyens. Une manière d’en faire moins pour dire beaucoup. Exercice de haut vol, ‘St° Denis’ incarne parfaitement ce minimalisme étincelant. Tandis qu’‘Eleonore’ promet le coup de foudre.
Imaginé dans une ancienne salle de montage, ce disque est la bande-son d’un film imaginaire. Co- produit par le mystérieux Noza, finalisé dans les studios de Rémy Lebbos, cet effort artisanal met le relationnel au cœur de la création avec, en filigrane, une volonté d’élaguer, d’alléger le propos et d’offrir de la place aux mélodies. Sans complexe ni prise de tête, Chance ose le changement. Et ça lui réussit parfaitement.
Prévente: 12€
Entrée: 15€